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Jour 1 - Rêve Jour 2 - Araignée

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Jour 2 - Araignée

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Raiari'i - Diramyr 16 de Cosma, île d'Aona'la

"De grandes choses vont arriver aujourd'hui." Comment peut-il en être autrement, lorsque les Divins nous envoient de tels messages ? Délicatement réveillé aux premières lueurs du soleil apportées par Iro, Gardien du Jour et de la Lumière, j'aperçus du coin de mon oeil une magnifique sai'ali se poser sur le seuil de ma fenêtre. Ces grands oiseaux au bec noir et aux plumes d'un blanc miroitant sont les messagers directs des Divins. Leur seul envol au dessus dans nos mara'e est un événement des plus rares et célébrés, mais je n'aurais jamais pensé avoir la chance d'en voir un d'aussi près... Pourquoi s'être arrêté dans mon humble fare, loin des lieux qui lui sont consacrés ? Une simple demeure de bois au toit tressé ? Aussi touché que déstabilisé, je vis cet impromptu visiteur tourner sa tête dans ma direction en laissant échapper quelques notes mélodieuses, avant de battre des ailes en décrivant plusieurs cercles dans la pièce. S'il restait encore quelque place pour le doute dans mon esprit, ce dernier s'était rapidement envolé : ce sai'ali attendait quelque chose de moi. Enfilant rapidement mes habits de voyage et ramassant ma gourde emplie d'aloi'a, je me déplaçai prestement vers le coin pour y saisir mon fidèle bâton. Caressant du bout des doigts ses reliefs creusés avec soin, réceptacle de la sagesse de mes ancêtres, je le plaçai à l'horizontale en travers de mes deux mains avant de m'agenouiller quelques instants pour communier sous le silence respectueux de mon observateur ailé.

Une fois mes prières accomplies, la sai'ali s'envola immédiatement par l'ouverture sans jeter un regard en arrière. Essayant tant bien que mal de suivre son rythme, je la vis partir vers le nord-ouest de l'île, vers les récifs acérés. Bien que je ne pouvais me permettre de contester la direction donnée par les Divins, j'avais bien du mal à comprendre ce qu'il pouvait y avoir d'importance là-bas. Après près d'une quinzaine de minutes de cette course effrénée à travers les petits sentiers de notre belle vallée luxuriante, je dus prendre quelques instants pour reprendre ma respiration. Adossé contre un rocher, ma guide ne semblait pas avoir vu que je m'étais arrêté. Pire encore, je la vis, après avoir scruté l'horizon pendant plusieurs instants, brusquement tourner vers la gauche, surplombant un épais bosquet que je cherchais à tout prix à contourner. S'il n'est en cette vallée que très peu de dangers, le Creux des Talate en fait indubitablement partie. Mais si c'est le chemin que je devais emprunter, qu'il en soit ainsi. Je n'ai qu'à faire le nécessaire pour me montrer le plus prudent possible. Après une petite gorgée d'aloi'a, je partis d'un pas preste vert l'orée de la forêt. Cherchant par-delà la cime se faisant de plus en plus dense, je cherchais à confirmer que la sai'ali était toujours là, mais en vain. Prudemment, je progressai sur le sentier tortueux, jonché de coques de noix, roches saillantes et petits ossements caché au creux des herbes hautes. Pour le moment, pas de fil en vue. Jetant un oeil vers les arbres, j'essayai de repérer des feuilles qui sortiraient de l'ordinaire, tout en essayant de ne pas traîner. Une tâche qui serait plutôt simple d'ordinaire.

Si ces Talate sont aussi craintes, c'est que ces grandes araignées nichent par dizaines dans les cimes, chacune s'enroulant à l'aide de son propre fil dans une feuille la rendant presque invisible. En tendant un fil depuis le sol vers leur cachette, en haut des arbres, elles se laissent immédiatement tomber sur leur proie lorsque leur fil se brise, en poussant un cri alertant leurs congénères. En quelques minutes, la pauvre victime est dévorée et il ne reste plus qu'un squelette n'attendant que d'être recouvert par la végétation. Nous autres sommes rarement inquiétés car nous sommes capables de repérer leur stratagème : en repérant les arbres aux quelques feuilles anormales, d'une forme ou couleur différente, nous pouvons simplement éviter de passer à proximité (en choisissant leur feuille au sol, les Talate ne sont pas capables de reconnaître l'arbre dont elle provient et s'installent parfois dans un arbre sans lien); sinon, en cas d'urgence, lancer un projectile à travers les fils pour déclencher leur piège en se tenant suffisamment à distance, mais il ne faut alors en aucun cas entrer au contact avec l'une des Talate au sol, sous peine de lui permettre de donner l'alerte à son tour. Une véritable réaction en chaîne qu'il vaut mieux éviter.

Sans surprise, c'est à peine à mi-chemin que je reconnus quelques signes de la présence d'arbres infestés. Les ossements au sol en nombre conséquent symboles de leurs derniers repas suffirent à m'en convaincre. Redoublant de vigilance, prenant soin de ne laisser raccrocher ni ma tunique, ni mon bâton, je parviens à me glisser entre les minces fils piégeant le chemin sans attirer l'attention de la moindre Talate. Les Divins devaient décidément voir mon aventure sous les meilleurs auspices, car malgré ces quelques instants de tension, le reste du trajet fut surprenamment tranquille. Une fois sortis du creux, je m'arrêtai quelques instants pour Leur adresser mes remerciements, puis descendis prudemment vers les récifs aux teintes roses et vertes, léchés par les va-et-vient de l'océan à la recherche de la messagère ailée. Ce récif est un lieu grouillant de vie, où petits poissons colorés, crustacés et coraux vivent en harmonie dans les multiples anfractuosités... et il ne vaut mieux pas y glisser au risque de gravement se blesser. Outre les quelques vagues venant mourir à mes pieds, le récif semblait surprenamment calme. Rien ne ressortait de cette vision paisible, si ce n'est la chaleur qui commençait à monter, suivant le cours du soleil. J'étais pourtant sûr que la sai'ali était partie dans cette direction, il devait forcément y avoir quelque chose ! Les minutes s’égrenèrent, les rayons se faisant plus pesants sur mes épaules, mais toujours rien... jusqu'à ce qu'un éclat de lumière intense provenant de la côte un peu plus à l'ouest vint directement m'aveugler. Me dirigeant calmement dans cette direction, je vis alors, à mon horreur, deux corps étendus sur la plage, au milieu de l'épave de ce qui devait être une imposante embarcation comme je n'en avais jamais vu auparavant. Manuscrits détrempés dans une langue n'ayant que peu de similitudes avec la mienne, vêtements parés de bleu et d'orange composées d'étoffes épaisses et ciselées ainsi que d'étranges objets aux formes variées, tantôt allongés, tantôt courbes dans une matière qui m'était totalement inconnue... et dont semblait provenir l'intense lumière que j'avais perçue plus tôt, reflétée par le soleil. Mais avant de regarder tout cela, je me devais de porter secours à ces deux étranges personnes.

La première semblait être une jeune femme aux grands yeux bleus et à la peau de ceux qui vivent sous le soleil. Si les larges cornes sur le front auraient pu me convaincre qu'elle était originaire d'un archipel voisin, le reste de ses atours me laissait penser à des origines plus lointaines. Ses longs cheveux noirs semblables à ces nuits sans lune étaient simplement attachés en une sorte de queue à l'arrière de son crâne. Elle portait sur ses épaules une longue cape grise au large col descendant jusqu'aux poignets, entourée d'une fine étoffe orangée allant de son épaule gauche à son flanc droit et rehaussée d'étranges boutons jaunes brillants semblables aux bijoux qu'elle portait aux oreilles. Cette cape recouvrait un fin vêtement blanc lui enserrant le torse de la taille jusqu'au cou, d'où n'émergeait qu'un seul bras, à droite. Une sorte d'étoffe épaisse de couleur marron épousait les contours de ses jambes, retroussée au niveau des mollets, faisant la jonction avec une épaisse paire de sandales recouvrant son pied en intégralité. Un très large chapeau surmonté d'une plume noire et agrémentée d'un petit bandeau de la couleur du lagon trônait à côté de sa tête, maculée d'une large tâche rouge ayant commencé à se mélanger au sable, ainsi qu'une fine pointe d'un éclat argenté, dont l'une des extrémités semblait plus acérée que les pointes du récif et l'autre aussi ouvragée que les gravures sur mon bâton.

L'autre personne étendue à ses côtés arborait un ensemble au style bien plus marqué, confirmant mes soupçons de leurs origines hors des archipels. De stature androgyne, ses cheveux ébouriffés étaient du même rose que les couchers du soleil tandis que son visage arborait un étrange dispositif recouvrant intégralement ses deux yeux, les faisant apparaître plus larges qu'ils ne le sont réellement. Portant lui aussi une longue cape marron au large col, cette dernière était cependant doublée d'une fine étoffe bleutée remontée au milieu des avants-bras, révélant une peau d'un blanc rosé comme je n'avais encore jamais vu et des mains recouvertes de fins gants noirs. Sous sa cape, une tunique composée de plusieurs étoffes, l'une du même bleu que l'océan ceignant sa taille, attachée à une autre enserrant son cou, d'un blanc immaculé également rehaussée de cette matière jaune brillante. Recouvrant une large ceinture bardée de nombreuses poches, une sacoche attachée par une petite sangle pendait sur son flanc droit, ayant déversé sur le sable humide une multitude de babioles rutilantes ainsi que des outils ressemblant à ceux que nous utilisons pour construire nos fares. Une étoffe aux tons sombres, bien plus large que pour la première personne, semblait également entourer ses jambes en se refermant au niveau des chevilles en des sortes de grandes sandales noires recouvrant elles aussi le haut de son pied. Un examen plus minutieux me permit d'apercevoir un épais collier ceignant son cou et bardé de gravures abstraites semblant presque... vivant, ainsi qu'une profonde blessure au flanc gauche ; son teint livide, presque blâfard me laissait présager du pire. Priant les Divins de me venir en aide, j'entrepris rapidement de les tirer hors du récif avant de leur appliquer des bandages sommaires en m'aidant des grandes feuilles poussant le long de la côte... Pourvu que je ne sois pas arrivé trop tard...

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